« Retournée » se comprend tout d’abord comme une ballade folk presque maladive, où une guitare lointaine n’ose pas éprouver les événements à venir. Une fièvre soudaine qui, dans les illusions et hallucinations qu’elle fait naître, déploie de fébriles retrouvailles avec le Moi intérieur de Bleu Reine. Elle qui, apparaissant en premier lieu comme un monolithe dissimulant ses émotions, laisse enfin se briser les murs de l’extase, voit rapidement son monde protecteur bouleversé par la reviviscence de fantasmes perdus. Le retour devient autant une brusque mais nécessaire ébullition sensorielle qu’un regard jeté par-dessus son épaule, tandis que tout semblait à jamais perdu et inavouable. Le chant de Bleu Reine épouse ainsi les images océaniques et humaines d’une créature échappant de peu à la noyade de la solitude. « Retournée » ouvre la faille inespérée de sensations puissantes et tétanisantes. Mais parvient également, au-delà de la révélation, à lier des sentiments inédits au cœur de celle qui, comme possédée, embrasse éperdument la lumière offerte.