Nier l’évidence. Celle qui semble la plus à même d’être saisie éperdument, comme si nous devions totalement nous immerger dans son réconfort. Comme si nos vies en dépendaient. Mais les regards, les gestes, les mots tremblent parfois, reposant sur des bases que la fragilité et la peur font immanquablement vaciller. Nous tentons de nous projeter vers et par l’autre. De nous perdre, que ce soit par les mots ou les sensations que nos neurones font s’entrechoquer. Finalement, « Denial » est, à de nombreux niveaux, un miroir. Un reflet, autant qu’une réflexion profonde, violente et tendre sur l’amour. Cet inatteignable objet du désir et de la perfection.
Beaucoup de chansons mélancoliques reposent sur cette question existentielle qui, malgré ses multiples variations et interprétations, n’a jamais réellement trouvé de réponse. Or, à travers la voix habitée, possédée de Chiara Foschiani, il est impossible de ne pas percevoir ces douleurs, ces connivences balayées d’un geste de la main, ces confidences réduites à néant et leurs blessures en nous, sur nos corps. Plus « Denial » progresse, plus il nous saisit à travers une redoutable justesse narrative et émotionnelle. S’arrêter sur les souvenirs aurait été vain, imparfait. Ce qui est ultime demande une caractérisation bien plus dense et vivante. Et c’est bien grâce à cet élément crucial que le single nous connecte à l’artiste et à nous-mêmes. Dans ces voix en écho de ce qui a été vécu, dans ces progressions instrumentales affirmant une volonté de ne pas sombrer dans l’immobilisation psychique et physique. « Denial » est fluide, mais ne sombre à aucun moment dans la facilité d’une chanson pop écrite sur un coin de table, un soir de déprime. Il est une analyse comportementale des effets principaux et secondaires. Il se replie sur lui-même pour mieux s’étendre à l’infini.
D’un désert aride où ne jaillit aucune source régénératrice, Chiara Foschiani déploie l’ombre puis la lumière, le feu puis l’eau. Par-delà la colère, l’isolement et l’introspection, elle érige le monument intemporel de ce que l’expression musicale du lien, de sa rupture et de ses conclusions tant insondables que clairvoyantes. Sortir des ténèbres, quoi qu’il arrive. Regarder le fruit défendu se flétrir puis se fondre à la terre, graine d’une renaissance autre, pleine et entière.