[Groover Time #16] Laura Delson, Bleunuit, Holbrook, VASLO, West of Java, Lui, Alex Vargas, Edie Yvonne et Pammy

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By Raphaël DUPREZ

[Clip] Laura Delson – Reflection

Le rock de Laura Delson a quelque chose d’unique en son genre. D’abord – du moins en apparence – très marqué par la mouvance aux sonorités pop venue des USA, ce dernier explore des mélodies qui le distinguent de ses glorieux aînés. Car la musicienne insuffle à sa musique un mystère toujours plus appuyé, dans le cas présent, par la réalisation de « Reflection ». Immédiatement, la chanson et le clip se parent d’une multitude de détails les rendant très vite fascinants. Miroir de l’évolution humaine amenant à s’approprier sa vocation, le résultat nous emmène auprès de la compositrice, de ses premiers balbutiements sonores à la concrétisation de ses aspirations et inspirations. « Reflection » est puissant et sensible, projection parfaite de celle qui, en embrassant totalement ses idéaux, se concentre à corps perdu sur ce que le destin lui accorde.


[Clip] Bleunuit – Pardon (Live Session au Jack-Jack)

La découverte de « Pardon », dans sa version originale, est l’un de ces petits chocs musicaux que l’on ressent parfois, sans s’y attendre. L’expressivité harmonique et vocale de Bleunuit y trouve un terrain propice à l’accomplissement du désir de ne pas être en total isolement ; de ne pas ressentir, au fond de soi, les méfaits de l’abandon. Une crainte qui, en live, s’épanouit d’autant plus : car elle devient une forme mouvante, un cri de mélancolie et de rage se dirigeant droit sur nous afin de mieux nous percuter. Cet hymne groove et pop de la solitude et de ses combats intérieurs se métamorphose en une déclaration universelle des douleurs psychiques et de la déperdition des sentiments. Explorer plutôt qu’implorer. Bleunuit propulse l’art du témoignage avec un talent rare et unique. Pour nous toutes et tous.


[Clip] Holbrook – Nari Nari

Histoire d’une folie et d’une descente aux Enfers. La désincarnation du personnage principal de « Nari Nari » joue avec nos nerfs, dans un maelström de fascination et de répulsion. S’amusant follement de l’impact des influenceuses et du paraître ambiant, Holbrook nous expose les coulisses de l’abandon de soi pour un quelconque profit, qu’il soit humain ou financier. L’imploration contenue dans les paroles de cette chanson hybride et insalubre est une détonation stridente, marquante. Tandis que nos vies se résument à nos posts et nos sponsors, « Nari Nari » en vient aux larmes, à la solitude sous-jacente se dissimulant inexorablement, une fois que la caméra s’éteint. Quitte à sombrer dans la démence et le désespoir, à appeler des puissances supérieures afin de remettre tout cet indécent bordel en place. Qui sait ? On peut toujours rêver… En attendant, visionnez ce bijou artistique bravant les interdits et s’imposant comme l’antithèse idyllique de nos projections virtuelles.


[Clip] VASLO – Amours

L’art de la définition de ce qui ne peut être dit est à la fois sage et périlleux. Ainsi en est-il des sentiments et, plus que tout, de celui se voulant ultime, incompréhensible, mystérieux. « Amours » est une succession de vagues tantôt douces, tantôt violentes. Un poème béni et maudit de VASLO pour ce qu’il cherche à explorer, à savoir, à exprimer. Dans sa mise en scène semblant sortir d’une pellicule ternie par l’âge mais toujours plus intemporelle, le clip se joue des éclairages, des masques, des chorégraphies de l’attraction et de la séduction. « Amours » est une rencontre avec le divin et le diabolique. Une expérience solitaire que l’on espère submerger grâce à nos paroles et nos actes ; mais qui, tant qu’elle n’est pas mesurée ou éprouvée dans ses strates les plus élevées, demeurera idyllique et inatteignable. Ce que VASLO parvient, avec sagesse et intelligence, à transcender et exprimer dans ses conjugaisons de la passion et de l’amertume.


[Single] West of Java – Mirage

Toujours ressasser les mêmes phrases, les mêmes commentaires. Digérer les remarques, les conseils, les rejets. West of Java a donné naissance à « Mirage » grâce à ces expériences, ces retours indécis et soi-disant constructifs. Qu’importe : le titre sera à l’image de son créateur. Une ode hip-hop au fil de laquelle se percutent les sentiments envers l’être aimé et les ressentiments envers ses juges. Ce qui transforme le single en une magnifique déclaration d’amour de moins de trois minutes ; soit plus qu’il n’en faut pour le compositeur afin d’atteindre son objectif. On pourra reprocher tout ce que l’on veut à West of Java ; mais certainement pas sa conviction ni son immersion total dans une œuvre qui lui ressemble et qu’il n’est certainement pas prêt à abandonner. Une cure de jouvence après le d’ores et déjà excellent « The Demons Within », que nous ne saurions trop vous conseiller afin de saisir tout le courage et toute la singularité de ce projet prêt à se battre et à vaincre.


[Clip] Lui – Love UK (Orchestral Version)

La version originale de « Love UK » était d’ores et déjà marquante, pour de nombreuses raisons. Sa puissance et sa confrontation à la violence quotidienne, tout d’abord, appuyées par un flow alliant la colère à la démence, la revendication au constat et à l’éveil des consciences. En produisant une extension orchestrale de cette piste consumée et à haute teneur inflammable, Lui explore toujours plus l’ambition de sa création : illustrer, par tous les moyens à sa disposition, la dérive d’un monde au bord de l’implosion. La performance, plus appuyée sur les mélodies et les arrangements, se voit magnifiée par une réalisation dont les paradoxes exultent dans leur cruelle et merveilleuse complémentarité. Le prisme de l’écran, plutôt que de cacher l’inavouable, le projette en plein jour, porté par une interprétation aussi lumineuse que crépusculaire. Un travail instrumental admirable et sensé, défiant les lois et les oppressions qui en découlent.


[Clip] Alex Vargas – Meant To Be Together (Studio Session)

La sobriété de cette merveilleuse studio session de « Meant To Be Together » achève de nous prouver, s’il en était encore besoin, qu’Alex Vargas mise tout sur la sensibilité à fleur de peau de son songwriting. S’écartant ainsi du format single en explorant ses capacités à dépasser la performance studio, le compositeur dévoile une facette toujours plus émotionnelle de son art et de tout ce qu’il a décidé d’y impliquer. Tant et si bien que nous nous sentons attirés à l’intérieur de l’écran, aux côtés d’un musicien tout sauf seul, dès que la magie opère. N’hésitant pas, dans cette démarche, à surmonter ses charmes sur microsillons, Alex Vargas démontre la puissance de sa voix et de son inspiration, la dévotion totale qu’il intègre à ses interprétations et poèmes solitaires. Une vague sublime de sensations douces et fortes, dont il nous est impossible de détacher le regard.


[Clip] Edie Yvonne – Random Boy

Il suffit d’une rencontre impromptue pour bouleverser le quotidien. D’un individu qui, de lambda, passera à l’obsession et à l’interrogation sur les gestes ou regards à lui accorder. « Random Boy » explore justement ces visites impossibles de l’inconnu, ces contacts n’étant pas destinés à obéir à une règle quelconque. Edie Yvonne signe, à partir de ce postulat, une chanson dont la pop tendre et frêle s’orne d’un clip fait maison cherchant par tous les moyens à fuir la tentation. En vain. « Random Boy » pourrait bel et bien chambouler l’existence de celle qui se trouve face à lui, cet être que personne ne semblait devoir mettre sur son passage. Un signe du destin, dans ce qu’il a de plus beau et intrigant.


[Single] Pammy – Cassandre

La beauté du monde se voit étouffée, oubliée. L’intégrité de chaque individu disparaît pour un profit qui, au final, demeurera toujours futile. Chacun subit, s’adapte, survit. Cette définition pessimiste et désabusée, ce constat amer et froid qui transparaissent du bouleversant « Cassandre », laissent gronder une révolution, une voix de la multitude en confrontation avec l’égocentrisme dictatorial d’une incontrôlable surproductivité. Tant à travers son chant que grâce à la puissance des échos de sa composition, Pammy heurte les codes d’une société de l’égarement et du consumérisme, de l’exploitation et de l’épuisement. Les arrangements se font explosion, révolte. La dynamique orageuse de cette plainte désespérée et trouvant néanmoins un exutoire à la fatalité, éclate au fur et à mesure de sa progression, de sa vengeance du plus faible face au plus fort. Et, sans aucune concession, retourne les évidences à son avantage, laissant apparaître la possibilité d’une insurrection et d’une délivrance. Impitoyable et extatique.