Comment se souvenir ? Y a-t-il réellement une manière de revivre, l’espace de quelques instants, ce qui a été ? N’est-ce pas personnel, unique pour chacune et chacun d’entre nous ? Lora Gabriel choisit le lieu, d’une importance cruciale. De même, elle privilégie le Super-8, convoquant alors la magie de l’éternel. « Week-end en utopie ». Poème de la perte, de la solitude, du manque. Malgré tout, en dépit de la souffrance, il faut rester digne et faire montre de respect et d’amour. Ces sentiments qui, sur le moment, nous paraissent tellement vains. La musicienne, elle, préfère les embrasser, fougueusement, désespérément. Sachant que les errances émotionnelles de sa chanson mèneront immanquablement à l’éveil, elle s’y donne corps et âme. Il n’y a qu’une chance de les exprimer, de les voir s’envoler vers celles et ceux qui nous ont été enlevés. Une preuve exceptionnelle et digne du testament infini.
Enchevêtrement du passé et du présent. Secondes suspendues, avides de tendresse et de magie. La mémoire est précieuse. Lora Gabriel écrit le poème lumineux et nostalgique de l’importance, de la place immuable de l’humain. Elle chante comme elle pleure, s’imprégnant de ses larmes afin de remplir les pages de ses cahiers d’écolière et de femme. Tant et si bien que l’utopie se transforme en une réalité tangible. Des sourires, des scènes sur pellicule, des projections de la présence que rien ni personne ne pourra effacer. Face aux dangers d’une telle vocation musicale et lyrique, la compositrice étreint ses sensations et sa sensibilité. Elle ressuscite l’intangible et nous le confie, tendrement et avec une bouleversante confiance. On dit que les êtres que nous aimons et avons aimés ne disparaissent qu’au moment où leur nom est prononcé pour la toute dernière fois. Face à ce fragile mystère, « Week-end en utopie » nous fait don de l’immortalité.
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