Une errance nocturne, vue de l’extérieur. La danse éternelle de véhicules désincarnés, déshumanisés. Le quotidien de citadins livrés à une obligation plutôt qu’à une nécessité. « Ice Floe » nous convie à suivre ces routes ne menant nulle part, à contempler les lumières artificielles et les structures de bâtiments dont rien ne semble devoir conserver la main de l’homme qui leur a donné naissance. Pourtant, tout se joue à travers ces artifices. Le présent, le futur, l’urgence. Temps Calme préfère laisser les images parler d’elles-mêmes. Filmer les labyrinthes de bitume et de béton, de néons et de métal. Au fil de l’asphalte infini, la chanson s’élève, mécanique, sensitive. S’immerger dans « Ice Floe » revient à sentir le froid et l’irritation de la lame du scalpel immatériel du monde.
Au milieu d’un tel décor, chaque phrase, chaque effet fait sens. Il ne s’agit pas d’écrire l’éloge funèbre d’une planète étouffée et en mode « autodestruction ». Au contraire, les mots et les instruments diffusent une atmosphère propice à la respiration, au survol dans des strates où l’air demeure plus respirable. Il n’y a rien de désabusé dans « Ice Floe ». Il reste un espoir, aussi infime soit-il. Grâce à ses fulgurances tendres et poétiques, Temps Calme est dans l’action, seule possibilité d’une prise de conscience et d’une compréhension accrue du phénomène prédéterminé où nous nous précipitons toutes et tous. En appelant à lui les souvenirs et prédictions de beautés encore à portée de main, le trio lillois nous offre une prédiction que nous n’attendions plus. Et qui, pour peux que nous prenions nos responsabilités, pourrait devenir réalité.